Donner de son temps dans la mesure du possible, aider dans les réalisations sans se les approprier, apporter des commentaires constructifs sans écraser l'initiative du créateur de l'objet, s'engager c'est trouver un délicat équilibre entre investissement personnel et synergie de groupe qu'il s'agit de redéfinir dans chacune de mes actions.
Ce stage a été l'occasion d'apprendre à gérer mon temps d'engagement, et de rencontrer la perméabilité entre univers "professionnel" et "personnel". Les rencontres formelles comme informelles font parti du quotidien d'une association. Ses membres passionnés, sont impliqués personnellement dans la réussite ou l'échec des projets, créant parfois d'âpres batailles sur la solution idéale. S'engager n'est pas de tout repos, peut être plus encore dans un collectif caritatif dont on sait que les résultats auront un impact direct sur la vie d'autres personnes. S'il est parfois difficile de travailler ensemble, les réalisations ne sont que plus satisfaisantes. Elles impliquent parfois de travailler jusqu'à 1h du matin, parfois sacrifier le temps de famille, de passer des dizaines de coup de fil, mais c'est là que l'on est témoins de la pugnacité et de la foi en la cause des associés. C'est aussi à l'association de trouver ses moments de fête et de célébrations donnant sens à ces dons de soi. Peut-être y a-t-il un manque de reconnaissance entre ces membres empêchés par les contraintes mentionnées précédemment de se voir régulièrement, et avec certains bénéficiaires des actions, en Haïti. Peut-être peut-on imaginer des alternatives en ligne? Dans tous les cas, s'engager permet de se confronter avec ses contradictions personnelles et est vecteur de multiples questionnements qui seront enrichissants pour mon parcours tant personnel que professionnel.
Cette expérience m'a familiarisé avec la réalité financière du milieu associatif, de ses contraintes, des contradictions personnelles qui nous font grandir. C'est une belle réponse qu'apporte le CORECOHF: c'est de la solidarité d'une communauté que peut émerger le succès d'initiatives solidaires. Etre coordinateur d'équipe est intensif, car on est au coeur des projets, on prend l'initiative, on est responsable. D'un autre côté, être en "fonction support" permet de se concentrer sur sa tâche et de la mener à bien sans que la multitude des informations de la vision d'ensemble et des prises de décisions nous perturbe dans notre travail. Il est intéressant dans une petite structure de pouvoir passer d'un rôle à l'autre, avec des échelles différentes: plus ou moins de liberté d'action, plus ou moins de capacité à "parfaire", être plus ou moins proche du terrain, et plus ou moins de responsabilité par rapport aux prises de décisions. La communication semble être au coeur de l'existence de l'association, tant interne, pour permettre aux membres de se coordonner, qu'externe, concernant la représentation de l'ARCHE face aux autres collectifs, tant la société civile que les autres associations haïtiennes. J'ai aussi réalisé que le management était un vrai métier: même si les personnes qui s'engagent sont passionnées, le temps manque parfois pour apprendre à se connaître et se coordonner. Cela prend du temps de construire un sentiment de communauté, de se mettre d'accord sur la façon de mener des projets, et parfois, à travers les barrières culturelles ou générationnelles, il peut y avoir un sentiment d'incompréhension. Cependant, ces obstacles m'ont aussi enrichi. C'est l'occasion de découvrir d'autres façon de penser, d'être humble, se remettre en question, de persévérer, et d'apprendre la résilience. Etre confronté à la diversité des parcours des membres de l'ARCHE, c'est aussi se rendre compte que ce qui nous parait une évidence ne l'est pas pour tous, que ce qui nous paraît un droit, pour d'autres est une chance.
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