Commémoration de Toussaint Louverture
Palaiseau, 10 mai 2021
Monsieur le maire, Madame la Députée, mesdames, messieurs les élus, chers amis
Mon propos d’aujourd’hui est extrait d’une longue réflexion que vous pourrez lire sur le site de l’ARCHE et sur celui du CORECOHF, Conseil Représentatif de la Communauté Haïtienne de France dont je suis le président.
Compte tenu de ce que fait la communauté internationale à travers le Core group et les instances onusiennes en Haïti, je l’ai intitulée : Une géopolitique suprémaciste sur fond de dissonance cognitive.
Je me garde, bien entendu, de vous faire une thèse en ce 20e anniversaire de la loi Taubira. Mais la démonstration constate l’impossible équation de dissocier l’humanité de la liberté. Malgré les racialistes, malgré les efforts désespérés des suprémacistes, ils n’ont jamais pu prouver scientifiquement qu’un être humain était supérieur à un autre être humain. Même en perpétrant les crimes les plus abominables, même en imaginant les sévices les plus diaboliques, ils n’ont jamais pu prouver ce délire de supériorité de race. L’abolition de l’esclavage est donc performative. En tout cas, pour les esclaves.
On aurait pu remonter plus loin dans l’histoire. De l’époque archaïque grecque (VIIIe siècle avant JC) en passant par la controverse de Valladolid 1550/1551, le code noir 1685 jusqu’après la révolution française, l’équation n’a pas été résolue. Alors ce suprémacisme ne comprend pas pourquoi les cibles de son délire résistent autant. Cette résistance prend des formes diverses. Les femmes avortaient, les hommes marronnaient ou se suicidaient. Certains se lançaient dans des expéditions punitives, brûlaient des plantations, tuaient des pseudos maîtres, qualifiaient ainsi d’immoral mais aussi de barbare le délire inqualifiable des suprémacistes.
À une loi injuste, nul ne doit obéir, écrit Saint Augustin. Le courant de pensée tel le racialisme et l’idéologie honteuse qu’est le suprémacisme ont toujours été pourfendus par une vérité immuable, éternelle : l’humanité et la liberté sont consubstantielles.
À Saint Domingue, l’actuelle Haïti, la figure de proue pour damer le pion à cette vision innommable qui a instauré l’esclavage se nomme François Mackandal. Il mena plusieurs rebellions dans le nord-ouest d’Haïti. Il est mort, brûlé vif par ce suprémacisme le 20 janvier 1758. Il fut des émules. La résistance ne faiblissait pas. Encore moins après la révolution française de 1789 qui déclara que tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit, mais qui n’abolit pas pour autant l’esclavage. La bataille continua toujours à Saint Domingue, et Duty Bookman, avec la cérémonie du bois caïman d’août 1791, allait contraindre les Français à respecter leur parole.
Puis c’est Toussaint Louverture qui rentrait en scène, forçant la France à prendre deux décrets : celui du 28 mars 1792, par lequel la France reconnut une moitié d’humanité aux hommes de couleur et aux nègres libres. Le décret devint proclamation le 29 août 1793 avec l’envoi à Saint Domingue des commissaires civils « Sonthonax, Polvérel et Eylau » pour sa mise en application».
Vous remarquerez là une évolution sémantique parce que l’histoire est dynamique. La convention prit un nouveau décret le 4 février 1794 qui s’intitule « Décret d’abolition de l’esclavage ».
Il n’est donc pas possible de dissocier l’humanité de la liberté. Dès lors on constate une dissonance entre les valeurs défendues par les prescrits révolutionnaires et les actes. En clair, la France ne met pas en pratique ce qu’elle argumente comme valeurs. Toussaint Louverture fut enlevé en 1802, assassiné en France en le 7 avril 1803 par Napoléon Bonaparte. Et Jean-Jacques Dessalines d’infliger à l’armée napoléonienne une cinglante défaite le 18 novembre 1803 à l’issue de laquelle il fonda le 1er janvier 1804, la première République noire indépendante au monde.
Cette victoire, qui abolit définitivement l’esclavage à Saint Domingue, préfigurait le Waterloo du 18 juin 1815, mais devenait aussi l’expression la plus frappante, la traduction la plus éloquente de la déclaration universelle des droits de l’homme. Et ce n’est que le 27 avril 1848 que la France abolit l’esclavage dans ses colonies. Aucune puissance esclavagiste n’eut eu envie d’abolir l’esclavage, crime contre l’humanité d’après la loi Taubira.
Aujourd’hui, les suprémacistes avancent masqués. Ils mettent leur dissonance cognitive au service d’une géopolitique conforme à leur vision : certains hommes sont inférieurs ; ils doivent être soumis. Et, c’est encore en Haïti qu’ils essaient de parvenir à leurs fins, dans le cadre du Core Group, un dispositif qui se dit ami d’Haïti mais qui fait tout pour la détruire.
Haïti étant un mauvais exemple pour les Noirs du monde entier. Haïti étant le pays où l’homme universel est né si bien qu’Aimé Césaire dit que la Négritude s’y est mise debout pour la première fois. Mesdames, messieurs, Haïti est ce pays où l’on vérifie l’indissociabilité de l’humanité de la liberté. Parce c’est une vérité éternelle illustrée par François Mackandal, Duty Bookman, Toussaint Louverture, et surtout Jean-Jacques Dessalines, les vrais abolitionnistes dont on tait les noms en France. À part Toussaint Louverture, bien entendu. Mais simplement par appropriation historique. Nous ne boudons pas notre plaisir de le partager avec le monde. Ce fut un homme noir. Un enfant de ce pays perle qui s’appelle Haïti.
Votre présence ici en cet après-midi du 10 mai est une preuve qu’il y a encore des Français qui ne s’arrangent pas avec l’histoire mais qui doivent avoir les informations tues volontairement par leurs dirigeants. Ceux-ci pratiquent une forme de négationnisme dangereux pour la libre circulation des Françaises et des Français dans le monde. Eux sont mus par la liberté, la solidarité, l’adelphité.
Je les en remercie. Je vous remercie encore une fois de votre présence malgré la crise sanitaire.
CAMPAGNE DE LEVEE DE FONDS POUR LE PARVIS DES ARTS ET DES SAVOIRS
Merci d'abord d’être venu(e)s nombreux(ses) au premier temps du festival des arts haïtiens en Essonne, qui a eu lieu à Champlan, le 1er février dernier. S'il a pu avoir lieu, c'est autant grâce au travail des membres de l'ARCHE que grâce à vous.
L'ARCHE fait la promotion de l’éducation et de la culture, agit pour la protection de l’environnement et appelle à la solidarité. En tant que stagiaire pour l'association, j'ai créé cette année une vidéo de 3min récapitulant nos objectifs et notre campagne 2020.
En participant au festival des arts que nous organisons, vous favorisez le dialogue des cultures et l’ouverture à l’autre. Vous soutenez aussi la construction du parvis des arts et des savoirs, une structure de salut public à Léogâne, commune haïtienne de 80.000 habitants, détruite à 90% par le séisme du 12 janvier 2010. Dans l'espoir de terminer ce projet, nous lançons aujourd'hui une campagne de levée de fond sur HelloAsso. Vous pouvez nous aider en y participant, et en la diffusant le plus largement possible dans votre cercle proche sur vos réseaux sociaux. En voici le lien: https://www.helloasso.com/associations/asso%20arche/collectes/pour-un-haiti-reconstruit-un-parvis-des-arts-et-des-savoirs-en-2020
Vidéo de la campagne Hello Asso pour le parvis des arts et des savoirs
Vous pouvez faire vos dons sur Hello Asso ou directement à l'association. Ils sont déductibles de vos impôts; l'Arche étant reconnue d'intérêt général. Parlez-en autour de vous.
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