La première réunion de commission a été organisée avec l'homme d'affaire Alexandre Robespierre et une membre de l'ARCHE nommée Edeline. Leur regard rétrospectif sur leur parcours et la relation que chacun avait avec Haïti témoignait de la diversité des trajectoires individuelles des Haïtiens de France. Nous avons discuté dans un premier temps de tous les projets que nous aimerions réaliser si l'ARCHE avait des moyens illimités, pour ensuite les prioriser dans l'ordre de ce qui semblait réalisable. Nous avons d'abord convenu que nous avions un petit problème d'échelle concernant le financement du Parvis des Arts et des Savoirs, une structure de développement que l'ARCHE construit en Haïti. En effet, le coût initial étant de 400 000 €, il était prévu de le construire en 3 ans.
Cependant, après une année plutôt bonne en terme de donation, l'ARCHE a eu du mal à rassembler l'argent nécessaire pour continuer à financer la construction. La conjecture défavorable en Haïti a également conduit à une inflation galopante provoquant une augmentation du prix final du parvis. La commission Finance réfléchit à la possibilité de stopper à financer ses autres projets de développement pour pouvoir terminer le Parvis. L'ARCHE a également eu des problèmes avec sa comptabilité du fait d'une alternance des comptables, et une tentative d'escroquerie de la banque. Voici les 6 solutions de collectes que nous avions envisagé pour tenter de pallier ces problèmes.
1. Story telling et crowdfunding
1. Créer un crowdfunding sur HelloAsso avec un témoignage d'un jeune ayant bénéficié des projets de l'ARCHE (eg. Construction de l'école), relayé sur Facebook et auprès de la communauté des amis Haïtiens.
Nous avons effectivement créé une campagne de crowdfunding. Devant la difficulté d'obtenir un témoignage de jeune Haïtien, les contacts n'étant pas facilités par la situation là bas, j'ai écrit une lettre sur mon expérience de bénévole à l'ARCHE (annexe 1). J'ai demandé à une amie bilingue et en étude de traduction de transcrire la lettre en anglais pour toucher un plus grand nombre. Malgré le soutien très actif des mentors de HelloAsso, disponible par téléphone et envoyant une documentation fournie par email, la campagne n'a pas décollé. La commission Finance n'a pas réussi a mobiliser les membres de l'association, pourtant les premiers donateurs de ce projet. En effet, selon les mentors de HelloAsso, l'argent récolté dans le cercle proche dans les premiers mois de la campagne constitue un dixième de l'argent qu'une campagne peut rassembler. Selon notre objectif de 30 000€, il nous aurait fallu atteindre 3000€, or, nous n'avons pu atteindre que 80€, malgré une campagne d'appel téléphonique menée chez les membres de l'ARCHE par une de mes amies recrutée pour l'occasion et moi-même. Si cette campagne d'appel nous a permis de connaître la cinquantaine de membres proches de l'ARCHE pendant le confinement, les résultats nous annonçaient que cette méthode n'était donc pas la bonne... Il semble que nous avions sous-estimé la résistance autour de l'utilisation des outils numériques. Cela est peut être dû à la différence générationnelle entre les membres de l'ARCHE et les outils que nous employions. Des critiques nous ont également été faites sur le message de donation "trop direct", nous invitant à repenser le message introduisant l'invitation à donner. Nous avons ensuite pensé à porter cette campagne dans des lieux publics (concert, supermarché) pour toucher un plus grand nombre de personnes, et plus jeunes. Malheureusement, le confinement est survenu au même moment contrecarrant ces plans. Ainsi, cette campagne ne fut pas fructueuse, mais nous a permis de réfléchir au décalage de générations et aux outils permettant de lever des fonds. Pour les plus âgés, déjà membres de l'ARCHE, les lieux de rassemblements physiques, les concerts de musique traditionnelle haïtienne, et les stands de nourriture et artisanat semblent être plus efficaces. La situation est différente pour les jeunes, car ils sont non-membres. Il semblerait que peu de jeunes Haïtiens entretiennent des liens forts avec la communauté, et que la priorité soit donnée à l'intégration à la culture française. L'immigration haïtienne semble être une immigration individuelle plutôt que collective: l'esprit de communauté reste à construire (ce que nous discuterons dans une dernière partie de ce rapport). Il faut donc développer des stratégies pour aller chercher des fonds autrement. Qu'est ce qui peut attirer des jeunes vers un pays et une cause avec laquelle ils n'ont a priori rien à voir?
2. Fonctionnement technique et communication
2. Créer un compte bancaire sur lequel les donateurs de l'ARCHE pourraient avoir une visibilité collective et ainsi pouvoir suivre leur argent en tout transparence + effet d'émulation
3. Installer une caméra 24h/24 pour filmer l'avancée des travaux en Haïti et retransmettre en direct pour les donateurs.
Concernant ces deux idées, des recherches sont en cours par Robespierre pour voir la possibilité matérielle de les réaliser. Quelques discussions ont été réalisées autour de l'éthique de la vidéosurveillance en Haïti. Pas de conclusion définitive jusqu'à l'avancée des solutions techniques.
4. Créer une carte de membre pour les donateurs réguliers et adhérents
La pertinence de cette solution est toujours discutée, ainsi que la possibilité matérielle de la réaliser. La cotisation régulière en ligne a pour avantage d'être automatique. Une fois que le donateur s'est inscrit une première fois avec un montant et une régularité, la somme est automatiquement prélevée sur le compte. Le désavantage est que la solution est considérée comme intrusive, et difficile à mettre en place pour les membres de l'ARCHE, peu habitués aux démarches numériques.
3. Célébrations
5. Organiser un gala pour les jeunes et investir sur la nourriture et les boissons de consommation pour dégager une marge
L'organisation d'un gala pour les jeunes semble être une bonne idée. Il faut encore constituer l'équipe d'organisation, les jeunes étant rares à l'ARCHE, l'idée reste en suspens. La consommation de boissons alcoolisées est également limitée pour des questions de sécurité, des débordements ayant eu lieu dans de précédentes manifestations de l'ARCHE.
6. Un partenariat avec des chanteurs connus Haïtien (Kerry James, Beyonce, Moonlight Benjamin) pour leur demander de participer à une levée de fond en faveur du développement d'Haïti
Il s'agirait là de prendre contact avec l'équipe des chanteurs et d'arriver avec un message convainquant d'engagement pour la cause, et de discuter les modalités de soutien possibles pour les associations haïtiennes. Pour un évènement d'une telle envergure, peut-être est-il nécessaire de travailler en partenariat avec d'autres associations haïtiennes.
4. Bilan personnel
Ces premières réunions dans l'ARCHE m'ont fait comprendre l'importance du réseau informel se tissant dans l'association. Peut-être plus que dans l'entreprise, les gens se groupent et agissent par affinités, puisque tout travail est bénévole. Ce cercle de sociabilisation constitue une bonne opportunité pour des jeunes de rencontrer des modèles d'entrepreneur, chercheur, écrivain, travailleur social, ayant réussi dans leur métier. Idée à creuser pour inciter plus de jeunes à rejoindre l'association?
Avoir un petit groupe de travail est agréable, mais on peut aussi se heurter au manque de compétences nécessaires pour faire émerger des solutions plus complexes et de plus grande ampleur. En l'occurence, la commission Finance comportait uniquement des membres relativement jeunes et nouveaux dans l'ARCHE, ce qui nous a empêché de prendre en compte la différence générationnelle avec les autres membres de l'association. Les solutions? Une prise de conscience de ce biais, mais aussi un élargissement des commissions pour accueillir des personnes de différentes tranches d'âge.
J'ai également pris conscience que la levée de fond exige un véritable savoir-faire, si ce n'est pas un métier à part entière. Les dons ou subventions trouvés dans les réseaux d'entrepreneurs ou des collectivités territoriales ne semblent plus suffisantes à l'aune des projets ambitieux que l'ARCHE souhaite réaliser. "On ne peut faire confiance en personne, on a seulement des intérêts communs avec une personne pour un moment donné" me confie un entrepreneur de l'ARCHE très réaliste. Comment transmettre ce message de solidarité avec un pays qui peut sembler si loin pour les Français? "Si l'ARCHE n'a pas obtenu cette subvention au profit de cette association malienne, c'est parce que les Haïtiens ne font pas encore assez entendre leur voix dans les urnes. Les Maliens sont plus rémunérateurs en termes de vote en Essonne" me révèle le président: le poids politique des communautés internationales en Essonne a un impact significatif sur les subventions attribuées aux associations, peut-être le message à faire passer est-il celui là. Les membres de l'ARCHE ne manquent donc pas d'expérience du terrain, mais peut-être l'association gagnerait-elle a accueillir en son sein une personne formée spécifiquement sur les thématiques de levée de fond capable d'apporter ses compétences pour mieux utiliser l'implantation sociale de l'ARCHE à son profit?
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